En tant que modeste artisan des mots, j’accorde une importance particulière aux mots qui envahissent notre quotidien, à ceux dont nous sommes abreuvés à longueur de journée et qui façonnent continuellement notre perception du monde. Complexe ? Pas vraiment. Prenons un exemple.
Aujourd’hui, on nous parle beaucoup de menace, de violence, de surveillance, de justice, de restriction des libertés individuelles, dans un processus qui s’enchaîne de mot en mot, de concept en concept. Un mot, donc, va en amener un autre dans une chaîne de mots qui vont modeler notre quotidien. Et leur répétition même va profondément changer notre perception de la société dans laquelle nous vivons, et, ultimement, nos actions et notre futur.
Nous vivons une époque de mots forts et violents. Les prétendus « philosophes » ou « penseurs » qui se succèdent sur nos écrans ne parlent que de guerre, d’agression, de bombardements pour « défendre les libertés » et autres concepts bien éloignés du principe même de la philosophie qui est « une étude de la sagesse ». Je ne suis pas un érudit, je n’ai jamais étudié la Philosophie et suis à peine allé au lycée, mais il me semble, de mon point de vue candide, que ces philosophes modernes se comportent plus en chefs des armées qu’en conseillers en sagesse.
La violence est la raison du faible. Ou, comme le disait l’écrivain de SF Isaac Asimov, le dernier refuge de l’incompétence.
D’où le sujet de cet article qui s’intéresse à un mot presque oublié, un mot suranné et un domaine qui n’était pas enseigné quand j’allais à l’école et qui probablement n’est pas plus enseigné aujourd’hui. Un mot qui pourrait pourtant changer notre quotidien. Je veux parler de l’éthique.
L’éthique se définit comme une science des mœurs ou de la morale. C’est une réflexion sur les comportements à adopter pour rendre le monde humainement habitable, un guide pour la recherche d’idéal de société et de conduite de l’existence afin d’atteindre une vie heureuse.
On parle encore un peu d’éthique professionnelle (dans certains domaines très spécialisés) mais pratiquement jamais de l’éthique en tant que valeur sociale applicable dans la vie de tous les jours.
En principe, on peut réduire l’éthique à une série de règles de conduite basées sur la raison pour nous permettre de vivre harmonieusement en société.
Tu ne commettras pas de meurtre. Tu ne voleras pas. Tu ne permettras pas à tes libertés d’empiéter sur celles des autres. Tu gagneras honnêtement ta vie. Tu utiliseras le pouvoir qui t’est confié pour le bien de tous et pas seulement le tien ou celui d’une minorité. Des trucs comme ça.
Des règles simples et claires sur lesquelles tout le monde peut s’accorder que, effectivement, c’est bien mieux pour tout le monde. Il n’en faut pas une multitude pour amener le calme et la sagesse dans une société. Une dizaine, une vingtaine tout au plus.
L’éthique s’enseigne d’ailleurs assez simplement par l’exemple et l’illustration. Il suffit que les gens qui nous guident en énoncent clairement les principes et les démontrent au quotidien par leurs actes, et la chose se répand assez vite.
Malheureusement, ce n’est pas un sujet qui semble intéresser beaucoup de monde, n’est pas enseigné de manière large, et qui n’est pas toujours démontré par nos guides.
Certaines religions ont intégré des points d’éthique dans leur dogme mais tous ne sont pas toujours réalistes ou à la portée de tout le monde. Je ne parviens peut-être pas à aimer tous mes prochains, mais si je m’abstiens de les assassiner, de les dépouiller ou de les asservir pour mon profit, je pense que c’est déjà pas mal. Et si je viole l’une de ces règles, la Justice sera là pour me remettre dans le droit chemin. Parce que chacun des points d’éthique est en fait un accord social dont la transgression est punissable par la loi.
Aucune justice digne de ce nom ne vous enverra en prison pour avoir échoué à aimer votre prochain comme vous-même ou pour ne pas avoir tendu la joue gauche quand vous étiez agressé. Ces choses-là appartiennent au domaine du spirituel et de la foi, et restent profondément personnelles. L’éthique n’est pas un domaine de foi mais de raison et naît d’un accord général pour le plus grand bien de tous.
Donc, avant même de parler de justice, de punition, de rétribution ou d’aller bombarder les populations civiles, il faudrait peut-être commencer à parler de l’éthique. De ces simples règles de vie que chacun peut comprendre et mettre en œuvre par soi-même pour vivre harmonieusement en société.
Mais non. Ce n’est pas un sujet. Personne ne s’y intéresse ni n’en parle. Les philosophes ont autre chose à faire. L’éducation aussi. Les gouvernants considèrent que cela ne les concerne pas.
C’est à la fois tragique et amusant de voir qu’un simple mot, un simple concept, pourrait faire une telle différence s’il devenait l’objet de notre attention commune. La raison est l’arme des forts. La violence celle des faibles. La raison tend vers la survie quand la violence ne tend que vers la destruction. Le monde est ainsi fait.
Il est dangereux pour une société de n’écouter que la voix de ceux qui prônent le châtiment et la violence. Parce qu’ils omettent un point très important, qui est, qu’avant qu’il soit devenu nécessaire de châtier tout le monde indifféremment parce qu’on ne peut pas mettre un flic derrière chaque personne, il faudrait peut-être commencer à mettre en avant les principes mêmes sur lesquels sont fondés les lois et la justice.
Ces principes sont ceux de l’éthique. Si chacun s’efforçait de les appliquer dans sa conduite et d’en répandre l’exemple, le monde dans lequel nous vivons deviendrait rapidement très différent. Mais si personne n’en parle, ne les exemplifie ni ne les enseigne, ça devient très, très compliqué. Ce n’est qu’un mot, peut-être, mais en tant qu’auteur, je me garde bien de négliger le pouvoir des mots.
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RépondreSupprimerVotre approche est finalement assez kantien à dogmatiser la raison..
SupprimerCeci permet effectivement, avec un exercice de la raison, a créer des volontés à obéir tout en donnant de la croyance a l'homme qui est libre..
Pour le rôle des philosophes , je suis assez d'accord avec vous,mais il y a des philosophes hédonistes qui sont peut-être moins médiatisés que les philosophes engagés